Dans l’Histoire de la sexualité : la volonté de savoir Michel Foucault positionne deux régimes de vérité de discours sur le sexe qui relèvent d’une science de la sexualité (scientia sexualis) et d’un art érotique (ars erotica). La tension entre scientia sexualis et ars erotica se retrouve dans le clivage entre le genre pornographique et l’art érotique dans la société contemporaine. Notre hypothèse est que le geste des créateurs cherche à reconfigurer les frontières entre la norme pornographique et la norme artistique et repousse ainsi les limites de l’histoire, de l’art, et de la sexualité. La méthodologie de l’atlas Mnémosyne de l’historien de l’art Aby Warburg avec son étude des gestes, ses formules de pathos et ses survivances ; le traitement des archives anthropologiques de la sexualité avec la notion de l’informe chez Georges Bataille ; et la performativité du corps érotique queer, nous permettent d’appréhender comment certains artistes s’approprient le genre pornographique depuis les années 1960- 70 et déjouent les grilles de lecture scientifiques aux catégories exclusives et au regard « objectif » . Car, au-delà du simple regard, l’appropriation artistique de l’imagerie pornographique se produit dans une pratique incarnée à travers les concepts de résonance charnelle et de force orgasmique (potentia gaudendi). Pure médialité, la pornographie se transforme à travers son appropriation et ses remédiations esthétiques. Ainsi, elle se trouve dotée d’une charge érotique et politique renouvelée. Des images aux gestes, il se crée un passage où s’entremêlent science, art et sexualité.