Les cidres du Québec sont des produits sont « localisés » tant par l’origine de leur matière première et leur lieu de fabrication que par le discours des cidriculteurs, des journalistes et des institutions. Leur localisation s’effectue de plus en interaction avec un environnement politique et économique particulier. Cette thèse analyse l’histoire du cidre au Québec en regard des constituantes du paysage social cidricole du Québec. Elle se développe autour des questions suivantes : en quoi le cidre est-il spécifiquement québécois ? Qu’est-ce qui en fait un produit « de qualité » ? Quelles sont les origines de la reconnaissance mondiale dont bénéficie le cidre québécois ? Je réponds à ces questions et plus largement à la question : qu’est-ce qui fait du cidre du Québec ce qu’il est aujourd’hui ? La thèse est construite en trois parties. La première présente une analyse des changements alimentaires au Québec et de la place des cidriculteurs dans le système alimentaire mondial. J’explique que la forme actuelle de la cidriculture est née en réaction à la mondialisation des marchés et à la dérèglementation de la qualité. La deuxième partie présente une sociogenèse du cidre au sein de l’histoire alimentaire du Québec. Par l’intermédiaire d’une biographie culturelle du cidre et, en particulier, du cidre de glace, elle montre que le cidre n’a pas toujours été un alcool de distinction comme il peut l’être aujourd’hui, mais qu’il a aussi été un objet médical, populaire, interdit, puis détesté et enfin apprécié. La troisième partie est une analyse approfondie des caractéristiques qui font la spécificité du cidre québécois actuel : (1) son héritage agricole ; (2) ses particularités de fabrication (les savoirs) ; (3) l’acquisition des savoir-faire des cidriculteurs ; (4) les savoir-être qui ont permis aux cidriculteurs de faire reconnaitre leur production et de protéger sa qualité. Grâce à l’utilisation d’une méthode de recherche qualitative et multisectorielle, cette étude du cas du cidre du Québec contribue à l’avancement des connaissances sur les spécificités historiques et politiques du cidre de la province, un exercice qui n’avait jamais été tenté. Enfin, elle illustre la réappropriation de la notion de « qualité » par les producteurs et son utilisation pour changer le paysage alimentaire plus généralement.